Le 4 décembre 2024, un crime spectaculaire secoue l’Amérique : Brian Thompson, PDG de United Healthcare, la plus grande compagnie d’assurance maladie du pays, est assassiné en pleine rue à Manhattan. En quelques heures, l’affaire devient virale. Le lendemain, les autorités diffusent un avis de recherche avec le visage du suspect principal : Luigi Mangione. Mais alors que la police le traque, un phénomène inattendu se produit sur les réseaux sociaux. Loin d’être unanimement condamné, Mangione est rapidement érigé en héros populaire, une figure de justice brute dans un monde gangrené par les inégalités.
Un assassinat qui devient un symbole
Les caméras de surveillance ont capté une scène saisissante : en plein cœur de New York, un homme s’approche de Brian Thompson et, sans hésitation, l’abat avant de disparaître dans la foule. L’image du suspect, Luigi Mangione, est aussitôt relayée par les médias et les forces de l’ordre. Mais sur les réseaux sociaux, c’est un tout autre récit qui prend forme.
En quelques heures, #JusticePourLuigi et #RobinDesBoisModerne deviennent des tendances sur X (anciennement Twitter). Pour certains internautes, Mangione n’est pas un simple criminel, mais un vengeur anonyme qui aurait frappé un symbole du capitalisme débridé. Le PDG assassiné était en effet une figure controversée, accusée par ses détracteurs d’avoir bâti sa fortune sur un système de santé inaccessible aux plus pauvres.
Un “bandit social” des temps modernes
Ce phénomène d’admiration pour un criminel n’est pas nouveau. Comme l’explique l’anthropologue David Picherit, Mangione correspond au concept de « bandit social », un hors-la-loi qui, aux yeux d’une partie de la population, incarne une forme de justice alternative. De Robin des Bois à Jesse James, en passant par les figures contemporaines de hackers militants ou d’activistes radicaux, l’histoire regorge d’individus ayant acquis une aura de justicier malgré (ou grâce à) leurs actes illégaux.
David Gilbert, journaliste spécialiste de l’extrémisme en ligne pour « Wired », analyse cet engouement comme un symptôme du malaise social grandissant. « Dans une société où les inégalités explosent et où les élites semblent intouchables, un acte de violence ciblé peut être perçu, à tort ou à raison, comme une forme de représailles populaires. »
Une fascination inquiétante ou une révolte légitime ?
Ce soutien massif soulève des questions profondes. Pourquoi un assassin devient-il une icône sur internet ? S’agit-il d’une perte de confiance dans les institutions ? D’un rejet du système capitaliste perçu comme oppressif ? Ou d’une simple fascination morbide pour les figures anti-héroïques ?
Alors que la chasse à l’homme pour retrouver Mangione se poursuit, les débats font rage. Certains dénoncent une apologie de la violence, tandis que d’autres voient en lui le symbole d’un ras-le-bol généralisé. Une chose est sûre : l’affaire Luigi Mangione ne fait que commencer, et elle risque de marquer l’histoire criminelle et médiatique des années à venir.